L’usine apprenante et inclusive tend à devenir un modèle

Au sein de l’usine de production, d’apprentissage et d’insertion de la fondation AMIPI, à Blois, les opérateurs, handicapés cognitifs, travaillent minutieusement pour l’industrie automobile française.
Crédit : DR

Installée à Blois depuis une bonne vingtaine d’années, l’usine de production, d’apprentissage et d’insertion de la fondation AMIPI – Bernard Vendre a déménagé au nord de la ville. Ses locaux, désormais plus grands, vont lui permettre de répondre aux commandes de l’industrie automobile mais surtout de continuer à insérer, professionnellement et socialement, des individus porteurs de handicaps cognitifs.

Lorsque l’on pense au terme « usine », on imagine encore le bruit incessant, la noirceur de l’huile de rouage, les odeurs, fortes, de divers produits. Les préjugés ont la vie dure avec l’industrie. Pourtant, aujourd’hui, nos usines ont changé. Certaines, même, sont en avance sur notre temps. A Blois, depuis environ 25 ans, la fondation AMIPI – Bernard Vendre a, par exemple, installé une de ses usines de production, d’apprentissage et d’insertion (UPAI). A l’époque, le projet est ambitieux : il s’agit de permettre aux personnes souffrant de handicaps cognitifs de développer leurs compétences, leurs connaissances, afin d’intégrer une entreprise dite classique. « Nous sommes partis du principe que la plasticité cérébrale existe, explique Maryse Vendre, co-fondatrice. Les activités manuelles mettent en éveil tous les sens, ce qui agit sur le système nerveux central et en corrige des défaillances. » Concrètement, chaque tâche réalisée par les mains de manière répétitive s’imprime dans le cerveau en créant de nouvelles connexions. Dans l’UPAI, l’apprentissage se déroule donc ainsi, étape par étape. Chacun y évolue donc à son rythme tout en participant au bon fonctionnement du site. Car si l’activité industrielle est un moyen et non une fin, l’enjeu reste de taille : les apprenants travaillent sur plusieurs petites pièces afin de fabriquer des faisceaux électriques pour les groupes automobiles PSA et Renault. L’usine inclusive de Blois dépend donc tout de même de la santé du secteur automobile.

Développer son cerveau, développer l’usine

En 2008, la crise économique a durement impacté la production des usines. L’UPAI de Blois a notamment souffert. Elle aurait pu fermer. Mais depuis environ trois ans, les commandes augmentent de nouveau et la production redémarre avec de nouveaux câblages automobiles à fabriquer pour PSA. Jusqu’alors, 80 personnes travaillaient dans l’usine inclusive blaisoise. Puis elles furent 90, 100, et sont enfin 110 aujourd’hui. Les locaux de 800 m2 ont commencé à devenir étroits. Si bien que l’activité s’est récemment déplacée dans des bâtiments bien plus spacieux de 2 700m2. « Ce déménagement a permis de retravailler la production et les flux, précise Philippe Dussauzet, le directeur de l’UPAI de Blois. En plus de gagner en rapidité de production, on a ouvert un magasin pour entreposer les éléments, directement sur le site. » Le nombre d’opérateurs apprenants est également, de fait, en hausse. Ils sont « recrutés » au sein de Cap Emploi, des missions locales et encore des instituts médico-éducatifs du territoire. S’ils sont intéressés et après un stage de quinze jours, ils intègrent l’usine en CDD plus ou moins longtemps. Dans ce cadre, un véritable programme a été créé par la fondation AMIPI. Pendant trente heures, les personnes participent à un module de neurosciences et d’apprentissage tout au long de la vie. « Le fonctionnement du cerveau leur est d’abord expliqué, expose Maryse Vendre. Ensuite, l’objectif est de leur faire prendre conscience de leurs compétences et de leurs savoirs faire, leurs savoirs être, afin de développer leur confiance en eux. » En trois ans, une centaine de personnes sont passées dans l’usine inclusive ; une trentaine ont été recrutées. A terme, certains apprenants handicapés décident de quitter l’UPAI pour se lancer dans une carrière professionnelle dans une entreprise « classique ».

Par Claire Seznec

 

Fondée en 1965, la Fondation AMIPI – Bernard Vendre est implantée dans le Grand Ouest français. Cholet, Nantes, Le Mans, Tours et encore Blois possèdent des usines apprenantes et inclusives et/ou des magasins. Ces établissements produisent et vendent plus de 8 millions de faisceaux électriques à destination de l’industrie automobile ; mais ils permettent aussi d’insérer des personnes handicapées dans le monde du travail. Depuis la création de ces usines, « plus de 1624 insertions durables » professionnelles ont ainsi été faites dans des entreprises dites « classiques ». Aujourd’hui plus de 880 salariés dont 750 opérateurs porteurs de handicaps cognitifs travaillent à l’AMIPI. Le modèle de la fondation pourrait se développer dans d’autres entreprises et sociétés. C’est en tous cas la volonté de Maryse Vendre, co-fondatrice, et de Jean-Marc Richard, président et membre fondateur.

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