Progrès et contraintes du numérique (1/3) Interview de Franck Bataille, chef d’entreprise à Blois

Pourquoi 55 % des entreprises françaises achètent-elles sur internet et seulement 17 % d’entre-elles vendent sur le web (1) ? Pourquoi 94 % de ces mêmes entreprises sont-elles convaincues de la nécessité d’être présentes sur le web et qu’une grande partie ne sont pas convaincues des apports concrets que le web pourrait apporter à leur activité (2)

Au regard des réticences de certaines TPE/PME à franchir le pas de la transition numérique (3), l’Épicentre a demandé à Franck Bataille, (président fondateur d’Agitys (4)  et expert en numérique ) d’apporter des réponses pour tenter de démystifier certaines idées reçues.

Photo @Nicolas Derré – Franck Bataille, président-fondateur d’Agitys

L’Épicentre : 20 % des entreprises estiment ne pas bénéficier d’un débit suffisant. Quelles sont les possibilités actuelles en matière d’accès à Internet pour les entreprises.

Franck Bataille : « Les accès traditionnels sur la ligne cuivre, comme l’ADSL et ses dérivés, constituent sur nos territoires la grande majorité des accès utilisés. Ils offrent des débits plus ou moins satisfaisants selon l’éloignement de l’armoire de raccordement opérateur. Ces technologies cuivre n’évoluent plus et sont effectivement de moins en moins satisfaisantes pour les entreprises ».

 L’Épicentre : On ne peut donc pas espérer mieux ?

Franck Bataille : « En complément, des solutions de type 4G fixe sont de plus en plus utilisées, mais là encore avec des limitations de débit et aussi de volume de données. Sans entrer trop dans les détails techniques, on peut dire que plus les fréquences utilisées sont élevées et offrent des possibilités de débits importants, moins elles pénètrent les bâtiments et portent loin. Par exemple, en zone rurale, une basse fréquence sera utilisée pour améliorer la couverture, au détriment du débit. Au contraire, en zone urbaine où la couverture est plus dense, l’utilisation de fréquences plus hautes permet de disposer d’un meilleur débit. L’arrivée annoncée de la 5G suivra le même principe en utilisant en zone urbaine de nouvelles très hautes fréquences et permettra des communications à très haut débit qui se rapprocheront du temps réel ».

L’Épicentre : Et la fibre optique ?

FB : « C’est un équipement très structurant et une vraie solution pour l’avenir. Le réseau de fils de cuivre actuel est au bout de ses possibilités techniques et coûteux à entretenir. Avec la fibre, la communication ne passe plus par un signal électrique, mais par un signal optique de portée très longue, avec des perturbations minimales et un très haut débit disponible, sans limite de volume de données. Cette technologie permet de s’affranchir des barrières des offres ADSL et 4G actuelles. Les futurs réseaux mobiles de type 5G ne pourront jamais faire aussi bien que la fibre sur un territoire aussi vaste et varié que le nôtre. Certes, la fibre est longue à mettre en œuvre car le chantier est titanesque, mais ce temps de construction est largement compensé par la flexibilité et la pérennité de ce système ».

L’Épicentre : Quid de la crainte du temps à consacrer pour maîtriser les outils numériques et de ne jamais pouvoir combler le retard déjà pris ?

FB : « La simplification des outils répond à ces craintes. Les outils numériques s’adaptent de plus en plus aux utilisateurs et correspondent de mieux en mieux à leurs besoins spécifiques. En d’autres termes, c’est la technologie qui rattrapera ce « retard » en s’adaptant aux usagers et non l’inverse. On le remarque depuis quelques années avec la très forte adoption des smartphones par tous types de publics. L’usage du « cloud », qui apporte des solutions de stockage, d’accès aux données et aux applications logicielles par l’intermédiaire d’internet plutôt que par des systèmes individuels sécurise aussi l’activité et le patrimoine professionnel de l’entreprise pour des coûts modérés. Notamment vis-à-vis du risque de pertes de données ou de piratage ».

L’Épicentre : Quand l’activité tourne bien, certains chefs d’entreprises ne voient peut-être pas l’utilité de se lancer dans le numérique ?

FB : « Si l’entreprise tourne bien, revoir certains processus métiers en utilisant des outils numériques fera qu’elle tournera encore mieux : on est alors dans une logique d’optimisation. Les organisations de travail évoluent et les applications numériques apportent des solutions. Par exemple, une entreprise de services qui vend les prestations de ses salariés pourra être amenée à gérer la productivité de ses collaborateurs autrement, pour les rendre plus autonomes sur leurs tâches et leur temps de travail. Le mode de rémunération ne sera plus établi sur des heures effectuées, mais sur des objectifs de production. Il faudra alors employer des logiciels capables d’automatiser la recherche d’informations dans les outils de production, de contrôler, de suivre, de repérer des dysfonctionnements… et de sortir des tableaux de bord à la demande mettant en évidence cette performance sur des critères quantitatifs et qualitatifs.  (« Business Intelligence ») ».

L’Épicentre : L’âge avancé du chef d’entreprise peut entrer en considération ?

FB : « Dans ce cas, le dirigeant sera sans doute amené à préparer la cession de son entreprise. L’acheteur s’attardera sur la modernité des processus métier, la sécurité des données, et demandera aussi si la gestion du RGPD (5) a été mise en place… toutes considérations qui entraîneront des moins-values sur le prix de la cession si le travail reste à faire. Autre souci : si les processus métier ne sont pas bien décrits, c’est qu’ils sont trop attachés à des individus. Tout doit être bien documenté pour les successeurs et les outils numériques sont souvent incontournables : l’acheteur devient immédiatement responsable des manques et devra rapidement y pallier pour des coûts parfois difficiles à évaluer ».

L’Épicentre : La crainte de ne pas savoir maîtriser les données accumulées face au RGPD peut entrer en compte :

FB : « Le RGPD n’est pas très complexe à mettre en place pour une TPE. Ce n’est pas une certification comme une ISO : c’est avant tout une façon d’organiser la gestion des données de son entreprise en établissant des règles. Par exemple, les données étant stockées pour une finalité particulière, on doit s’assurer qu’elles ne pourront pas servir à d’autres fins par négligence, voire, autant que possible, suite à un piratage. Et c’est justement la sécurité informatique qui pêche le plus dans les petites structures ».

L’Épicentre : Quelle démarche engager pour intégrer les outils numériques au développement de l’activité d’une TPE, à la sécurité de ses données et pour quel coût ?

FB : « Il faut commencer par établir un diagnostic de maturité numérique de l’entreprise et écouter beaucoup avant de proposer quoi que ce soit. Il s’ensuit des préconisations souvent peu coûteuses : par exemple, passer au « cloud » ne demande pas d’investissement majeur en dehors de quelques heures de conseils et d’un accompagnement de départ. Beaucoup d’entreprises ignorent qu’il peut être simple de retrouver ses données suite à la perte de son téléphone, à un piratage ou au bris de son ordinateur si on a mis en place les bons outils pour s’y préparer. Il est fondamental pour une entreprise de s’adresser à des professionnels qui sauront les guider afin de leur éviter des choix hasardeux dans un domaine qu’elles ne maîtrisent pas. L’enjeu peut être la survie même de leur activité sur les affaires de sécurité informatique ».

(1)  Baromètre du numérique édité par la Direction générale des entreprises (DGE).

(2)  Source Afnic : Association française pour le nommage Internet en coopération.

(3)  Source Ceser.

(4)  Agitys à Blois (www.agitys.com) Contact : Franck Bataille – Tél. 02 54 74 05 05

(5)  RGPD : Règlement général sur la protection des données.

(6)  GIP RECIA à Orléans. Contact : Remi Toisier – Tél. 06 86 87 40 35

Le Syndicat Mixte Ouvert (SMO) Val de Loire Numérique pilote les projets de déploiement de réseaux numériques d’initiative publique en Loir-et-Cher et en Indre-et-Loire. D’ici 2022, tous les habitants et les entreprises de Loir-et-Cher et d’Indre-et-Loire auront accès au très haut débit via la fibre optique.

La fibre optique ouvre un champ infini d’usages numériques pour les professionnels :

  • Échange et partage de fichiers volumineux en temps réel ;
  • Dématérialisation des outils métier et usage du cloud ;
  • Vidéo-conférences de qualité en haute définition ;
  • Outils collaboratifs en temps réel pour les équipes
  • Sauvegardes et protection du patrimoine numérique
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