Le bâtiment tire la « cloche » d’alarme

Loïc Chapeaux, le directeur des affaires économiques de la FFB : « La politique du logement est incompréhensible. »
Loïc Chapeaux, le directeur des affaires économiques de la FFB : « La politique du logement est incompréhensible. »

Ce n’est plus une sonnette, mais un glas qu’agite la FFB. Le bâtiment sonne l’alerte et presque l’agonie pour un secteur qui souffre et qui semble pourtant avoir les solutions à ses difficultés. Mais l’État reste quasiment sourd à ce carillon qui, pourtant, résonne fort à Bercy. Le 14 mars se tenaient à Orléans les « assises du bâtiment », pour évoquer cette crise.

Si la France est en esprit olympique, eu égard à Paris 2024, force est de constater que bon nombre de secteurs industriels ne sont pas de cet avis. Celui du bâtiment n’échappe pas à la règle. « Ça ne va pas très bien, concédait Erwan Croixmarie, président de la FFB (Fédération française du bâtiment) du Loiret. De tels chiffres pour le secteur du logement n’ont pas été vus depuis trente ans. Avec – 27 % de mises en chantier, plus qu’un coup de frein, c’est un coup d’arrêt. »

De l’avis même de la Fédération nationale du bâtiment, « la politique du logement est incompréhensible ». C’est clairement ce que dit Loïc Chapeaux, le directeur des affaires économiques de la FFB nationale, qui redonne quelques éléments de contexte pour 2024. Tout n’est pas négatif : un reflux de l’inflation à 2,5 %, contre 4,9 % en 2023, l’érosion des taux d’intérêt, et une petite baisse des crédits immobiliers. Mais en contrepoint, sans doute un ralentissement de la croissance à 0,4 % en volume, accompagné d’une remontée du chômage à 7,6 %. « Rappelons, dit-il, l’entrée en application du ZAN [dispositif Zéro artificialisation nette des sols, ndlr], avec les incidences directes évidentes : diminution du nombre de zones constructibles, et donc une augmentation du prix du foncier. Par ailleurs, la quasi-stabilisation des prix des matériaux ne couvre pas le coût du travail, qui a augmenté. »

Le neuf en berne, la réno va mieux

Dans tout cela, le logement neuf, qui représente 30 % de l’activité du bâtiment, focalise toutes les inquiétudes. On constate en effet la diminution de 30 % des mises en chantier partout en France, et une baisse de près de 20 % du nombre de dépôts de permis de construire. « 287 000 logements ont été mis en chantier en France en 2023, c’est très faible, et on va continuer de creuser le trou du logement en 2024. Si rien n’est fait, on passera en dessous des 250 000 logements, un chiffre historiquement bas ». Social ou privé, à la campagne ou en métropole, tout le monde est à la même enseigne. Un segment redécolle toutefois, la commande publique locale, notamment pour l’amélioration et l’entretien des locaux publics, qui compte désormais pour 54 % de l’activité du bâtiment ; en phase d’accélération.

Ajoutons que « Ma prime adapt » et les audits de performance énergétique se mettent en place, ainsi que le plan ÉduRénov, pour la rénovation des écoles.

Malgré tout, la FFB prévoit que le bâtiment entrera en récession en 2024, entraînant la perte de 90 000 emplois en France.

« Ce qui plombe l’évolution du PIB, poursuit Loïc Chapeaux, c’est l’investissement des ménages ; en clair, la construction et l’entretien des logements. Bercy constate évidemment que les rentrées fiscales (IS et TVA) sont plus faibles que prévu. Or, la consommation des ménages demeure. La crise du neuf risque à terme de plomber les finances publiques, que l’on chiffre en dizaines de milliards d’euros. »

La FFB demande donc clairement le rétablissement du prêt à taux zéro sur l’ensemble du territoire (un dispositif d’aide aux primo-accédants, qui, à défaut, restent locataires).

La FFB plaide aussi le retour au dispositif Pinel pour l’investissement locatif privé, et la simplification drastique de Ma Prime Rénov. « Elle est annoncée par Gabriel Attal, observe Loïc Chapeaux, acceptons-en l’augure. »

Stéphane de Laage

Erwan Croixmarie, président de la FFB du Loiret : « Plus qu’un coup de frein, c’est un coup d’arrêt. »
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