Attirer les jeunes dans l’enseignement supérieur en région Centre-Val de Loire

De gauche à droite : Alicia Leon, Justine Louis, Neal Deslangle et Julie Salesse.

Le magazine L’Épicentre s’est rendu au CCI Campus Centre de Blois pour parler enseignement supérieur en région Centre-Val de Loire. Alicia Leon est designer graphique et illustratrice à son compte et ancienne étudiante de l’ETIC au CCI Campus Centre. Justine Louis est chargée de relation entreprises alternance / formation continue au CCI Campus. Neal Deslangle est en Mastère ingénieur d’affaires en alternance au CCI Campus et commercial au sein de l’entreprise Cheminées Marcel Raymond. Julie Salesse est chargée de recrutement et de promotion et ancienne étudiante du CCI Campus. Rencontre.

 

De nos jours, on parle beaucoup d’attractivité du territoire et d’attractivité des entreprises. Que pensez-vous de ces enjeux ?

Julie Salesse : Dans mon métier, l’attractivité est importante car une formation ne se vend pas toute seule. Tout le monde peut faire de la formation. Tout le monde peut se former à distance, de chez soi. Il y a plein de possibilités de se former et, souvent, ce qui va faire la différence, c’est l’environnement. On entend beaucoup les salariés parler de qualité de vie au travail, mais ça commence quand on est en formation, d’autant plus quand on est en alternance.

Alicia Leon : J’ai fait quatre ans d’études à Blois, je m’y suis sentie très bien et j’ai eu envie d’y rester. C’est important que la région soit attractive. Ça donne envie de venir et d’y rester.

Justine Louis : On essaye de garder les talents qu’il y a sur le territoire pour qu’ils intègrent nos entreprises et qu’ils contribuent au développement économique du territoire. On fait en sorte de garder les étudiants et qu’ils ne partent pas à Orléans, Tours ou Paris, car on a besoin de futurs salariés, diplômés, compétents, avec de l’expérience et un savoir-faire.

 

Aujourd’hui, y-a-t-il plus d’offres des écoles et des entreprises que de candidats ?

Justine Louis : La tendance s’est inversée. Avant, les personnes peinaient à trouver du travail, des alternances, des offres. C’était l’entreprise qui avait la mainmise. C’est elle qui choisissait qui elle allait recruter. Aujourd’hui, c’est l’entreprise qui doit se vendre, vendre son territoire, le cadre de vie… Les entreprises sont en difficulté de recrutement. On a fait ce travail de promotion pour répondre aux besoins des entreprises en termes de profils.

Julie Salesse : Et pour les garder sur le territoire les années qui suivent, car l’intérêt de l’alternance, c’est ça. L’enjeu, c’est que l’entreprise arrive à proposer le premier emploi, et pas seulement de former l’étudiant pendant un an, qu’elle ait investi un an et qu’il parte dans une autre entreprise avec le savoir-faire. Il faut que l’entreprise soit attractive dès le contrat d’alternance, car, si la personne commence par l’alternance, il y aura un sentiment de confiance. Si l’enjeu est compris dès le début, on évite ainsi que les talents partent vers d’autres structures.

Neal Deslangle : Je n’ai pas eu de mal à trouver une alternance, car, déjà quand j’étais en bac pro, j’ai fait mes stages dans mon entreprise actuelle. Je suis resté dans la même entreprise. C’est un environnement qui me plaît. Je n’ai jamais eu envie de changer au cours de mes études, sachant que je suis assez autonome. J’ai la mainmise sur quasiment toute la stratégie commerciale. C’est plus ou moins moi qui fais office de directeur stratégique. J’aime la région, je viens d’ici et je voudrais bien y rester.

Alicia Leon : Par rapport à ma promo, parmi ceux qui étaient en alternance on voit ceux qui sont restés dans la région et ceux qui ont bougé car leur alternance n’était pas dans la région. Ceux qui étaient à Paris sont restés à Paris, ceux qui étaient dans la région sont restés dans la région, pour la plupart.

 

L’image de l’alternance a évolué depuis plusieurs années. Selon vous, pour quelles raisons ? Et quels sont les avantages de l’alternance ?

Justine Louis : Avant, l’alternance était vue comme une voie de garage par beaucoup, moi la première. Dès que j’ai voulu faire de l’alternance, au lycée j’ai eu un avis défavorable pour mon orientation, tout en étant bonne élève. C’était mal vu, car souvent associé aux métiers manuels, et se salir les mains n’était pas forcément quelque chose de positif. Aujourd’hui, de plus en plus d’écoles font de l’alternance sur n’importe quel métier car les entreprises ont besoin de personnes qui ont de l’expérience. L’alternance permet d’avoir la théorie et la pratique.  On a le concret du métier. On sait si ça nous plaît en tant qu’apprenant. On développe des compétences et c’est un plus car, maintenant, quand on voit une offre on nous dit : « Il faut que vous ayez de l’expérience et un diplôme ». L’alternance, c’est le bon compromis.

Julie Salesse : Je pense aussi que ça place l’étudiant dans de meilleures conditions financières et que ça a permis à certains d’entre eux d’accéder à des études supérieures, alors qu’ils n’auraient jamais pu sans cela. Qui dit études supérieures dit frais de scolarité, et tout le monde n’a pas la chance d’avoir une famille aisée. Ce qui coûte cher, ce ne sont pas seulement les études, c’est vivre, passer le permis pour être mobile… L’alternance, c’est aussi accéder à des études supérieures, même si on n’est pas scolaire. Un master, et même un bac +3, avaient un aspect élitiste à une époque. Aujourd’hui, c’est commun. Le public étudiant, la première question qu’il me pose c’est « combien vais-je gagner ? ».

Justine Louis : Et, à l’inverse, les entreprises me demandent « combien ça va me coûter ? ». Les entreprises ont besoin de recruter, mais ça a un coût pour elles. Parfois, l’aide de l’État conditionne l’embauche. On a aussi la prise en charge des coûts pédagogiques par l’OPCO qui permet d’accéder plus facilement à des embauches. L’alternance permet à l’entreprise de se familiariser avec un profil, une personne, de former sur sa politique d’entreprise, sur son fonctionnement et, derrière, d’embaucher quelqu’un.

Julie Salesse : Et ça permet aussi aux étudiants de tester des entreprises de différentes tailles, des secteurs d’activités différents, des missions différentes. Ça leur permet de savoir ce qu’ils veulent faire et ce qu’ils ne veulent pas faire. Souvent, ce n’est pas le jeune qui a des craintes sur l’apprentissage, ce sont ses parents, avec des craintes avérées ou non, car tout le monde n’est pas en capacité de faire de l’apprentissage. Ça demande une agilité, une organisation, un rythme assez soutenu. Certains n’ont ni la capacité, ni la volonté de le faire. Ça demande aussi une agilité intellectuelle et pratique. Pour ceux qui choisissent cette voie et qui réussissent, c’est le bon compromis avant de se jeter dans le grand bain du marché du travail.

Neal Deslangle : Souvent, quand on arrive en alternance, il y a une attente qui est moins forte que si on était directement employé. Ça enlève du stress et ça permet d’avancer un peu plus à son rythme que si on était directement employé. L’entreprise paye un SMIC à quelqu’un qui est absent une semaine par mois. Mon entreprise propose de m’embaucher depuis le BTS. J’ai toujours voulu continuer mes études depuis que je suis en bac pro. J’ai toujours dit que je voulais aller le plus loin possible. J’ai toujours voulu continuer à apprendre. Quand j’ai commencé mes études, je me suis dit que le master serait le point le plus haut, où je pourrais avoir un maximum de compétences. J’ai toujours continué en ce sens et mon entreprise m’a toujours suivi.

Propos recueillis par Maxence Yvernault

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