Plateforme de baby-sitting collaboratif née à Tours en 2021, Freebulle vient de boucler sa première campagne de financement participatif via la plateforme citoyenne et locale Efferve’sens, qui lui a permis de recueillir plus de 7 000 euros. Lauréate du Trophée Gustave – qui récompense les entreprises et les initiatives innovantes sur le territoire -, cette entreprise de l’Économie Sociale et Solidaire est désormais présente dans plus de mille villes en France et vient de dépasser la barre des 5 000 inscrits. Entretien avec Romain Gautier, co-fondateur de l’entreprise, qui espère bien faire de Freebulle la plateforme référente de l’entraide entre parents !
Créée par Jennifer Champion et Romain Gautier en 2021, l’histoire de Freebulle – plateforme collaborative de baby-sitting qui met en relation des parents prêts à s’entraider, à travers, notamment, du temps de garde ponctuel – commence en réalité cinq ans plus tôt, en 2016, en Touraine, lorsque les deux entrepreneurs accueillent leur premier enfant. Jennifer Champion est alors professeure des écoles et Romain Gautier responsable “grands comptes” dans une entreprise de matériel médical. Elle travaille à une heure de leur domicile familial, lui est en déplacement toutes les semaines. Très vite, les difficultés de garde se font ressentir, en même temps que la famille s’agrandit avec l’arrivée d’une deuxième petite fille. Les horaires atypiques et les urgences de dernière minute deviennent pour eux incompatibles avec les modes de garde traditionnels, tels que les crèches et les assistantes maternelles. “Face à ça, ma conjointe s’est dit : des parents, il y en a partout autour de nous, pourquoi on ne pourrait pas s’entraider ? Au début, ce n’était qu’une idée”, se souvient Romain Gautier. “Ma conjointe, Jennifer, ne se plaisait pas tant que ça dans l’éducation nationale, elle s’est lancée seule dans un premier temps dans ce projet, pour se familiariser avec le monde de la tech et de l’entrepreneuriat. Rapidement, elle s’est constitué un réseau d’une centaine de familles sur la région tourangelle. Tous les parents étaient dans la même situation, notre ressenti n’était pas isolé, bien au contraire. Je l’ai rejointe rapidement et on a fait de Freebulle une aventure familiale”. Un constat et des difficultés partagées donc, qui viennent donner corps à ce qui n’était au départ qu’une simple idée. “On a réfléchi avec plusieurs familles du territoire sur la façon la plus pertinente de s’entraider. Au début, tous les matchings se faisaient à la main, via un groupe Facebook. On avait organisé des groupes messages par quartiers de la ville. Les parents lançaient leurs demandes et on cherchait des familles à proximité pour pouvoir constituer les groupes de garde. Mais on s’est rendu compte qu’il y avait beaucoup de demandes de dernière minute et le temps de réactivité n’était pas là, alors on s’est orientés vers une application. Maintenant, les demandes de garde sont pourvues en moins de dix minutes”.
Une solution basée sur la solidarité et le vivre-ensemble
Le principe de la plateforme de baby-sitting collaboratif est simple et fonctionne avec des bulles : “En rendant des services, on gagne des bulles”. Les parents qui ont besoin de faire garder leurs enfants postent leur demande sur l’application. Les familles aux alentours sont notifiées et peuvent y répondre. Quinze minutes de temps de garde permettent de gagner une bulle. Les bulles sont ensuite réutilisables sur l’application pour faire garder à son tour ses enfants. “On a opté pour des bulles afin de créer une monnaie d’échange virtuelle. On ne voulait pas ubériser le secteur de la garde des enfants”, explique Romain Gautier. Les familles qui auraient besoin de davantage de bulles peuvent toutefois en racheter. Sur l’application, une bulle équivaut à un euro. “Ça revient à quatre euros de bulles pour une heure de garde, ce qui est très accessible. Et c’est l’objectif de Freebulle. La bulle, on la vend également en carte-cadeau”. Pour le co-fondateur de l’entreprise, cette solution, basée sur la solidarité et le vivre-ensemble, permet également de créer du lien social entre les familles d’un même territoire. “Que les parents qui peuvent être amenés à se croiser tous les jours puissent tisser des liens, c’est également l’une des promesses de Freebulle”.
Le troc 2.0 entre parents de confiance : un pas supplémentaire en faveur de la transition écologique
Depuis la fin d’année 2021, l’entreprise s’est diversifiée en proposant également à ses inscrits de l’échange, du prêt ou de la vente de matériel pour enfants. La seconde main étant désormais monnaie courante, Freebulle et ses fondateurs ont voulu, eux aussi, intégrer le marché du reconditionné pour agir en faveur de la planète. “L’urgence sociale et écologique nous appelle à changer de modèle pour répondre à nos besoins, mais surtout à ceux de nos enfants. Nous sommes convaincus que le succès de la transition écologique et sociale repose sur de nouveaux types de consommation, qui préservent l’environnement et les relations humaines”, déclare Romain Gautier, avant de poursuivre : “quand on sait que 100 000 tonnes de jouets sont jetées chaque année en France et que seulement 4% des jouets sont réemployés alors que 50 % sont techniquement réutilisables, on a envie de trouver des solutions”.
L’entreprise Freebulle travaille désormais avec plusieurs partenaires : des collectivités, des associations et des entreprises. Ces dernières représentent d’ailleurs un levier très important pour le développement de la plateforme. “Aujourd’hui, 30% des absentéismes en entreprise sont dus au manque de garde”, argue Romain Gautier. “On a une solution. Maintenant, il faut transformer l’essai. L’objectif, c’est que Freebulle soit à la parentalité ce que Blablacar est au covoiturage”. En tout cas, les voyants sont au vert !
Johann Gautier