Les trois associés, Marc Charpentier, Martin Pellet, et Youssef Chraibi (de gauche à droite) dirigent La Brasserie Fondamentale @Albin-Durand
Du côté de Malesherbes, la Brasserie Fondamentale produit un million de bouteilles de bière*, en partie avec l’orge récolté dans les champs environnants. Trois jeunes entrepreneurs tiennent les tireuses.
De la fourche à la fourchette, a-t-on coutume de dire pour parler des circuits courts. À Nangeville, près de Malherbes (Loiret) on dirait plutôt du champ au bock. C’est, en effet, une bière issue en partie des champs d’orge environnants qui est élaborée dans les fermenteurs de la Brasserie Fondamentale. Depuis 2019, cette jeune entreprise, créée par trois anciens étudiants d’une école de commerce de la région parisienne, qui ont installé leur site de production sur les terres d’un exploitant agricole de Nangeville. La rencontre s’est faite via les réseaux sociaux. Les trois fondateurs, Marc Charpentier, Martin Pellet, et Youssef Chraibi, cherchaient une implantation après le succès de leur atelier de brassage parisien « La Beer Fabrique » où chacun peut venir s’initier à l’élaboration de la bière et repartir avec sa production personnelle.
Orge et malterie en circuit court
L’exploitant agricole de Nangeville, Stéphane Fautrat, cherchait, lui, à faire évoluer son activité pour passer de la production de matière première à la transformation sur place. « Nous étions faits pour nous entendre, se félicite-t-il, car l’orge est ma culture principale sur les 120 hectares de l’exploitation ».
Les astres de la bière étaient particulièrement bien alignés puisque, à une vingtaine de kilomètres de Nangeville, à Pithiviers précisément, est implantée l’une des malteries du groupe Soufflet, la référence nationale, voire internationale, du monde de la brasserie. Les Malteries Soufflet produisent 2,3 millions de tonnes de malt par an dans leurs 27 sites dont 19 à l’étranger.
« Nous avons construit notre brasserie à l’intérieur d’un bâtiment de l’exploitation de Stéphane Fautrat en 2019 au beau milieu des champs, rappelle Youssef Chraibi. Nous avons opté pour un outil de brassage très perfectionné, notamment avec un système de récupération de l’eau pour irriguer ensuite les cultures ».
Une base de quatre bières
L’investissement de plusieurs millions d’euros est à la hauteur des objectifs de production de l’équipe de la Brasserie Fondamentale. Ils ont pu mesurer l’appétence du public pour leur bière grâce à leur atelier parisien où des centaines d’amateurs sont venus, et viennent toujours, composer leur propre création. « Cela nous a permis de mettre au point une gamme de quatre bières qui constituent notre base : une Pale Ale (blonde), une Bière de blé (bière blanche), une Belgian Ale (bière ambrée) et une IPA (India Pale Ale). Leur caractéristique commune est d’être élaborées à partir de céréales françaises, sans conservateur, non filtrées et non pasteurisées, comme d’authentiques bières artisanales ».
Cette approche séduit les consommateurs des bars et restaurants dans lesquels sont distribuées les bouteilles de 33 cl à l’étiquette blanche portant la mention LBF barrée d’un bandeau de couleur différente selon la nature du breuvage.
Présente dans le TGV
Les associés ont aussi ouvert un bar à Paris et un autre à Bordeaux intitulés « Le Bar Fondamental » pour conserver les initiales LBF, leur marque de fabrique. « Nous sommes distribués dans certains magasins bio et dans le TGV où nous sommes la seule bière artisanale », se réjouit Yousset Chraibi.
Cette reconnaissance et ces succès commerciaux ont fait « mousser » la production de la Brasserie Fondamentale qui a atteint le chiffre impressionnant d’un million de bouteilles de 33 cl en 2020. « Nous pourrions aller jusqu’à six millions de bouteilles en ajoutant des fermenteurs supplémentaires », anticipe Youssef Chraibi.
La brasserie de Nangeville fait travailler quatre personnes pour la production et une dizaine d’autres collaborateurs pour le développement commercial et l’administration.
LBF a réalisé un chiffre d’affaires d’un million d’euros en 2019, et a enregistré une augmentation l’an dernier malgré les circonstances très défavorables.
Les perspectives portent sur le passage en bio de la gamme permanente et le lancement de bières éphémères à base d’associations gustatives inattendues comme abricot-cerise ou café-rhubarbe. Les jeunes brasseurs n’ont pas peur de brasser aussi les goûts.
Par Bruno Goupille
*L'abus d'alcool est dangereux pour la santé. A consommer avec modération.