Cet article fait partie de notre dossier spécial « Transition énergétique » du mois d’Avril 2020, à retrouver en intégralité dans notre version pdf.
En 2017, l’Institut NégaWatt a réalisé un scénario de transition énergétique pour la région Centre-Val de Loire. L’objectif ? Définir de nouvelles politiques publiques pour atteindre 100% d’énergies renouvelables en 2050.
Souvenez-vous : il y a dix ans de çà, l’énergie nucléaire tenait une part prégnante en Centre-Val de Loire, l’une des régions françaises les plus dotées en centrales nucléaires (4 centrales, 12 réacteurs). En 2012, elle produisait 76% des sources primaires d’énergie fabriquées sur notre territoire ; seuls 5% des énergies étaient alors renouvelables ; le reste concerne les énergies fossiles. Notre région joue un rôle national de premier plan dans la production, le stockage et le transport d’énergie. Elle exporte la majorité de l’électricité qu’elle produit, de part sa situation géographique. Si bien qu’en 2009, « plus de 90% de l’énergie consommée en Région Centre-Val de Loire était issue d’importations (produits pétroliers, gaz naturel, uranium, charbon ».
Du 100% renouvelable dans 30 ans ?
Lors de la promulgation de la loi sur la transition énergétique, le Centre-Val de Loire a décidé de s’emparer du sujet. L’association et institut NégaWatt, qui a mis au point une méthode de scénarisation pour modéliser la transition énergétique, a été choisie pour décrire, jusqu’en 2050, une trajectoire énergétique ambitieuse, proche du 100% renouvelable pour la région. Cette fameuse méthode s’appuie sur trois grands piliers : la sobriété (prioriser les besoins énergétiques essentiels), l’efficacité (réduire la quantité d’énergie nécessaire), et les énergies renouvelables. Plus de 2 000 paramètres sont alors étudiés pour que la modélisation soit réalisée, comme par exemple le nombre de personnes par voiture ou par logement, le rendement des systèmes de chauffage et encore le taux de recyclage des matériaux. L’objectif du 100% renouvelable en 2050 est-il donc possible dans notre région ? La réponse sera plutôt oui, si tant est que le scénario soit respecté à la lettre. « Il ne suffit pas de décarboner l’énergie pour faire la transition énergétique », apprend-on dans le rapport de NégaWatt. Dans le même temps, il faut réduire les risques et les impacts liés à notre modèle énergétique.
Selon le scénario de l’institut, le Centre-Val de Loire pourrait ainsi voir son paysage énergétique se transformer d’ici à 2050. Plus équilibré, il donnerait la part belle aux énergies renouvelables à 98%, ce qui permettrait de remplacer le nucléaire, tout simplement, mais aussi le pétrole et le gaz fossile ; les pertes et gaspillages seront réduits ; des économies d’énergie seront même possible dans les secteurs du bâtiment et des transports. Dans la région, la ressource locale en bois énergie, pour le chauffage, serait utilisé de manière plus importante qu’aujourd’hui. Les biomasses solide et liquide, elles, devraient continuer à se développer grâce aux déchets verts, de papeterie, au bois, mais aussi à la méthanisation qui connaît déjà un intérêt croissant chez les agriculteurs.
Comment faire la transition ?
Le chemin est long pour atteindre l’objectif NégaWatt. Il demande l’implication de tous les acteurs (collectivités, Etat, entreprises, associatifs…). Pour formuler des propositions concrètes, la Région Centre-Val de Loire a dessiné les grandes lignes de ce qui devrait se passer. La première étape (2017-2020) est la mise au point du « plan guide de la transition énergétique ». Nous sommes actuellement dans cette période et le Plan Climat énergie régional y répond. La deuxième étape (2020-2030) serait la décennie de la montée en puissance des énergies renouvelables et de l’adaptation des réseaux existants, conjointement avec la fermeture progressive des réacteurs nucléaires. La troisième étape (2030-2040) serait celle de la transition vers la sobriété énergétique, avec une baisse des besoins en énergie et donc de la consommation, en particulier en ce qui concerne l’habitat (récent et ancien) et les bureaux. Enfin, la dernière étape (2040-2050) serait celle de « la marginalisation du recours aux énergies fossiles ». Concrètement, les bâtiments doivent mieux isolés thermiquement ; les déplacements doivent se faire un peu moins mais pour beaucoup mieux (« l’utilisation de la voiture diminuerait de 91% à 68% des kilomètres effectués entre 2015 et 2050 ») ; l’alimentation doit être plus locale et l’agriculture, elle, doit préserver et favoriser la biodiversité (la consommation de protéines animales diminuerait au bénéfice des protéines végétales) ; les réacteurs nucléaires doivent fermer « après 40 ans de fonctionnement » et ces fermetures doivent être lissées dans le temps pour être maîtrisées. Enfin, si le scénario se concrétise, NégaWatt prévoit une stabilisation du travail d’ici à 2050 avec de nombreuses reconversions professionnelles des employés actuels du nucléaire dans les énergies renouvelables.
Si ce scénario a l’air simple, il ne l’est pourtant pas. Ses objectifs non plus. La région Centre-Val de Loire doit désormais prendre des mesures politiques fortes pour permettre au territoire de devenir, dans trente ans, un territoire 100% vert en énergie.
Par Claire Seznec.