[Article initialement paru le 1er juin 2023]
La rumeur d’un remaniement ministériel enfle dans le tout-Paris. À l’approche de l’été, nous lançons les paris : le député vendômois Christophe Marion pourrait être de la partie !
Alors que le cap des 100 jours fixé en avril par le président de la République approche, le tout Paris s’agite. « Matignon va changer de locataire », assurent les uns, arguant d’un exécutif bicéphale tirant à hue et à dia. « Ce sera un remaniement », pour exfiltrer quelques ministres en difficulté et ceux « qui n’impriment pas », gagent les autres. En tout cas, ce sera avant l’oût, foi d’animal ! À moins que cela ne soit au retour des cartables. Ou une fois la flamme olympique éteinte… Plus encore que dans le domaine sportif, parier en politique n’est pas chose aisé. Joueur, on s’y risquera : le Loir-et-Cher pourrait compter bientôt un nouveau ministre ! Son nom ? Christophe Marion, ci-devant député du vendômois.
Maurice Leroy, Jacqueline Gourault, Marc Fesneau… On sait le terreau loir-et-chérien favorable, et le président de la République pas indifférent aux charmes du département. Certes, le risque de terres épuisées par ces récoltes successives n’est pas à exclure, qui pourrait inciter le Prince à les laisser en jachère. Mais encore faut-il trouver ailleurs des terres fertiles, donnant plus de blés qu’un meilleur avril ! « Le vivier Renaissance n’est pas très important. Et Christophe Marion est l’un des rares élus Renaissance à avoir fait basculer une circonscription en faveur d’Emmanuel Macron. Ils ne sont pas si nombreux », observe un spécialiste de la carte électorale.
La jeune pousse est en outre en pleine croissance. « Christophe Marion n’est pas un politique professionnel. Ce n’est que son premier mandat national », relève un connaisseur du monde politique local. Or, le président de la République n’aime guère les têtes blanchies sous le harnais, tout à son souhait de renouveler la classe politique. « Soyez fiers d’être amateurs ! », lançait-il ainsi, en 2020, à ses parlementaires.
Les fleurs laisseraient également présager une fructueuse récolte. « Christophe Marion a particulièrement investi le poste. Il en a très vite pris la mesure. De manière générale, il travaille ses dossiers et monte rapidement en gamme. C’est une éponge », juge notre observateur. L’élu s’est d’ailleurs rapidement fait remarquer à Paris où, avouons-le, ses collègues ne brillent pas tous d’un même éclat. « Il sait se montrer très influent. Il est déjà connu par à peu près tous les cabinets – et pas seulement celui du ministre de la santé, sujet sur lequel il est très investi –, alors qu’il avait très peu de réseau à l’Assemblée », nous enseigne un membre de la haute administration. La venue de plusieurs ministres – et celle toute récente du président de la République à Vendôme, sur un de ses sujets de prédilection, la santé – en attestent. Si Christophe Marion conteste toute idée d’« adoubement » dans ce déplacement présidentiel, il y voit pour autant « une forme de reconnaissance, notamment du travail accompli sur les déserts médicaux, et d’ouverture d’esprit du président, compte tenu de ma position, hostile au 49.3, lors de la réforme des retraites ».
En circonscription, qu’il laboure, il serait aussi proche du sans-faute. « Il fait du Momo », assure un élu local, vantant sa bonhomie. S’il n’est pas certain que l’intéressé goûte la comparaison avec Maurice Leroy, il est assurément facile d’accès. « Il est urbain et courtois, jamais agressif », observe un fonctionnaire qui le pratique. « Il est adroit, et ne se fâche globalement avec personne. Ses relations avec le maire de Vendôme ou du président du conseil départemental sont apaisées », ajoute un autre. Laurent Brillard, président de Territoires vendômois, confirme : « Il y a le temps de la campagne électorale, et il y a le temps de l’intérêt général. Avec Christophe Marion, nous avons su laisser de côté nos sensibilités, et je dois avouer que nous travaillons fort bien ensemble, avec de véritables échanges ».
D’aucuns lui reprochent toutefois une tendance un peu trop marquée au « en même temps », soucieux qu’il serait de ne froisser personne. Ce que conteste un fonctionnaire amené à travailler avec lui : « Il est courageux et assume son positionnement. En témoigne ses prises de position contre le 49.3. Et c’est un interlocuteur tenace, qui revient souvent à la charge, qui ne se laisse pas marcher sur les pieds ». La toute récente célébration du 18 juin 1940 en témoigne. Le député y a tenu un discours offensif, en rappelant que le parti ouvrier internationaliste rejetait en 1944 d’un même mouvement « la libération de Roosevelt » et le « socialisme d’Hitler ». Et l’ancien agrégé d’histoire de dénoncer « la confusion des valeurs » et ce « relativisme » toujours à l’œuvre qui autoriserait « certains à rapprocher nos institutions de la Ve République à celles d’un régime monarchique [le coup d’État permanent ?], voire même fasciste ».
Le fait que Christophe Marion émargeait auparavant au Parti socialiste pourrait également aider à sa nomination, surtout si le futur Premier ministre venait de la droite. Reste que le principal intéressé rejette – pour l’heure ? – toute hypothèse gouvernementale. « Je suis un homme de terrain. J’ai besoin de ce contact, c’est ce qui me plait », nous assure Christophe Marion, qui entend « continuer de se donner à fond, sans rien avoir en tête, et surtout pas les prochains mandats ». Peu avant, il nous avait expliqué que « le fait d’appartenir à la majorité présidentielle est une bonne chose pour la circonscription. C’est un accès direct au gouvernement qui aide à débloquer les dossiers ». Et de prendre pour exemple le cas de la maternité vendômoise (v. L’Épicentre n° 202, p. 26), pour laquelle, selon lui, « tous les voyants sont au vert » depuis la venue du président (même si le transfert ne sera sans doute pas finalisé en juin, comme semblait le souhaiter Emmanuel Macron). Dans cette logique, nul doute qu’un maroquin ne desservirait pas… « Attention aux ascensions trop rapides. Ce serait un peu tôt pour lui », prévient toutefois un observateur de la vie politique, qui souligne que le fait de voir l’élu « se brûler trop rapidement les ailes ne serait pas sans déplaire à certains ». Décidément, nul ne fait l’unanimité en politique. Pas même Christophe Marion ! (et c’est sans doute heureux).
Frédéric Fortin