Un « biocoulis » innovant contre la sécheresse des routes

Le produit à base de carbonate de calcium a été injecté sur une portion de route de 230 mètres à Saint-Loup-des-Vignes.
Le produit à base de carbonate de calcium a été injecté sur une portion de route de 230 mètres à Saint-Loup-des-Vignes.

À l’initiative du conseil départemental, un procédé original, unique en Europe, est testé sur une route du nord du Loiret pour remédier aux fissurations provoquées par la sécheresse des sols argileux.

Les routes aussi souffrent de la sécheresse. En rétractant les sols argileux, elle provoque des fissurations qui peuvent devenir dangereuses, notamment pour les deux-roues, et accélèrent la dégradation de la chaussée. Le département du Loiret, dont une bonne partie du sous-sol est constitué d’argile « gonflante » (s’élargissant ou se contractant selon le taux d’humidité), est particulièrement concerné par ce phénomène. C’est la raison pour laquelle une expérimentation inédite, unique en Europe, est conduite depuis cet été sur une portion de route à Saint-Loup-des-Vignes, entre Bellegarde et Beaune-la-Rolande.

Élaboré par une start-up suisse

En lien avec le Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement) – un établissement public auquel adhère le département depuis 2018 – et l’ORSS (Observatoire des routes sinistrées par la sécheresse), des injections d’un produit à base de carbonate de calcium ont été effectuées du 17 au 28 juillet dernier. Sur une portion de route de 230 mètres de long, le produit élaboré par la start-up suisse Medusoil a été injecté le long de l’accotement jusqu’à une profondeur de deux mètres. Baptisé « Biocoulis », il possède la faculté de minéraliser les particules de calcite contenues dans l’argile et d’améliorer ainsi sa cohésion et sa résistance aux effets de l’humidité. Plusieurs centaines de points d’injection, disposés tous les mètres en quinconce, ont reçu chacun une trentaine de litres de ce Biocoulis innovant.

Capteurs et station météo connectés

Afin de pouvoir mesurer l’efficacité de ce traitement en fonction des conditions météorologiques, 20 sondes hygrométriques ont été disposées le long de la chaussée, couplées à une station météo connectée au Cerema. Une réfection de la chaussée a également été effectuée.

Le département du Loiret a investi 230 000 € dans cette expérimentation qui constitue le troisième chantier conduit dans le cadre du marché de recherche et développement avec le Cerema.

Il faudra laisser du temps au temps pour analyser les données sur une période intégrant au moins trois phénomènes de sécheresse. On pourra alors savoir si la route a bien digéré son injection de Biocoulis.

« Ce test intéresse de nombreux autres départements français, et nous aurons en novembre une journée technique nationale »
Lamine Ighil Ameur
docteur en mécanique des sols

Interview de Lamine Ighil Ameur, docteur en mécanique des sols

Lamine Ighil Ameur, travaille au sein du pôle « risques naturels » de l’agence de Blois du Cerema. Il pilote l’expérimentation technique de Saint-Loup-des-Vignes.

Le produit injecté dans le sol présente-t-il un risque pour l’environnement ?

Non, car il s’agit de la combinaison de deux composants totalement naturels que sont le calcium et le carbonate. Des tests ont néanmoins été réalisés afin de s’assurer de l’absence d’impact sur l’environnement et sur le personnel. Ils se sont révélés négatifs.

En quoi la solution testée à Saint-Loup-des-Vignes constitue-t-elle une première européenne ?

Le produit élaboré par la start-up suisse Medusoil a été testé dans un premier temps pour la prévention des glissements de terrain. C’est la première fois qu’il est utilisé pour remédier au problème de sécheresse des routes.

Ce test intéresse de nombreux autres départements français, et nous aurons en novembre une journée technique nationale pour envisager la généralisation du procédé et créer un observatoire national.

Quel est le prix de revient de ce traitement, et le coût ne constitue-t-il pas un obstacle à son développement ?

Le prix de revient du traitement varie beaucoup en fonction de la nature des sols et de la configuration des lieux. La fourchette de prix va de 60 à 200 € le mètre carré. Il convient de comparer ces investissements avec le coût d’une rénovation. Nous avons un rôle de conseil, mais c’est au gestionnaire de l’infrastructure de choisir entre plusieurs solutions.

Propos recueillis par Bruno Goupille

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