Éric Buchy et Gérald Chomat ont cofondé « Laboratoires Eriger » à Chambray-lès-Tours (37). Leur histoire pourrait être celle dont raffolent les Américains tant elle ressemble à une success story. Rencontre avec les co-fondateurs qui viennent bousculer les géants de la cosmétique.
L’histoire démarre en 2017. Éric Buchy est pharmacien, docteur en chimie organique et travaille sur l’encapsulation de molécules (enfermement d’une substance dans une capsule). Dans l’appartement d’à côté vit Gérald Chomat, expert depuis 20 ans dans les matières premières cosmétiques.
« Très tôt, glisse Gérald, j’ai identifié la technologie d’Éric comme disruptive, écologique et technologique ». Les deux hommes discutent alors d’un projet d’entreprise en 2017 et leur société baptisée Laboratoires Eriger (jeux de mots avec leurs prénoms) démarre en mars 2019. Si le covid a pu, comme bien des entrepreneurs, les questionner sur la pérennité de leur entreprise, c’était sans compter sur leur foi en leur technologie.
Un concept précurseur
Pour comprendre le concept et les enjeux de l’encapsulation, Gérald Chomat la compare avec le jus d’orange. « Ses vitamines ont une durée de vie courte si elles ne sont pas protégées. Depuis 70 ans, la science essaye de protéger ces molécules. L’exercice reste difficile tant elles sont petites. Les technologies actuelles utilisent une base de lécithine type soja ou de tournesol. Avec la chlorophylle que nous utilisons, il y a un avantage de taille puisqu’elle existe partout. On se soustrait aux problèmes écologiques et géographiques puisqu’elle est fabriquée gratuitement par la nature, partout, sans culture spécifique. On ne met pas la pression sur la nature ».
Éric Buchy complète : « notre capsule est plus légère que celle faite avec du soja et elle contient plus d’actifs. Nous avons donc un meilleur rendement ».
Après deux ans et demi de tests sur la formulation, la pénétration dans la peau, etc., les résultats du Centre de contrôle Spincontrol sont sans appel : la technologie des Laboratoires Eriger s’adapte très facilement aux molécules.
Une technologie aux multiples potentiels
Très vite, les premiers échantillons sont donc envoyés aux clients. Parmi eux, des laboratoires de cosmétiques comme Nuhanciam et des multinationales.
22 pays distribuent aujourd’hui leur technologie brevetée aux quatre coins de la planète. « Notre budget en propriété intellectuelle est très élevé au niveau international. Nous cassons les idées préconçues type : une meilleure technologie ne peut venir que d’une grosse boite. Or, les plus gros ne sont pas les plus innovants et on va plus vite qu’eux », précise Gérald Chomat.
Si les Laboratoires Eriger fonctionnent toujours en mode start-up avec leurs 19 collaborateurs, l’entreprise continue son développement notamment avec une activité de façonnage : « le client arrive avec sa molécule instable. On fait des tests. Aujourd’hui, quinze projets sont en cours, dont trois aux USA et un en Israël. »
Des soutiens régionaux forts
Les co-fondateurs ne tarissent pas d’éloge sur la région Centre-Val de Loire et la BPI, soutiens de toujours. Grâce au cumul des aides et aux levées de fonds, près de 4 millions d’euros ont ainsi été versés.
En avril dernier, l’entreprise est devenue l’une des lauréates du prix « France 2030 régionalisé » avec son projet d’amélioration du rendement de certains antibiotiques. « La pharmacie est venue nous voir, précise Éric Buchy. Notre technologie est facilement transposable sur tous les secteurs et seule la réglementation va changer. »
Si les quatre dernières années sont passées vite, « on continue d’accélérer. Tout se goupille bien car on anticipe bien. Aussi, ce qui nous arrive n’est pas trop surprenant et nous rassure. »
Avec un déménagement sur Tours dans une usine cinq fois plus grande début 2024, une chose est sûre : les Laboratoires Eriger n’ont pas fini de faire parler d’eux !
Camille Colloch