La sucrerie de Corbeilles-en-Gâtinais fait travailler 125 personnes avec une capacité de traitement de 11 500 tonnes de betteraves par jour.
Mobilisé pendant la crise sanitaire pour fournir de l’alcool, le groupe sucrier Cristal Union engage un plan de restructuration qui va augmenter l’activité des sites de Pithiviers et de Corbeilles-en-Gâtinais.
Une crise peut en cacher une autre. Pour le groupe sucrier Cristal Union, elle peut en cacher deux autres. La crise sanitaire, si elle a eu des effets bénéfiques immédiats pour le fabricant de sucre et d’alcool, ne peut pas masquer la crise économique qui en découle ni celle, mondiale, de la production de sucre.
« Nous faisons partie des entreprises bienheureuses de la crise », se félicite pourtant le directeur général de Cristal Union, Alain Commissaire, dans le journal en ligne de Cristalco, sa filiale commerciale, le 15 mai dernier. Il est vrai que la période de confinement a déclenché chez les français un réflexe de stockage de produits de première nécessité qui a bénéficié au groupe sucrier et sa marque Daddy, leader du marché français. Il a fallu réapprovisionner en continu les rayons de la grande distribution et les stocks le permettaient largement.
L’autre effet « bénéfique » de la crise sanitaire pour Cristal Union a été l’explosion de la demande en gel hydroalcoolique. Car le groupe, premier acteur français des sucres industriels, dispose de dix sucreries et de quatre distilleries produisant 7 millions d’hectolitres d’alcool et de bioéthanol par an, en temps normal. Depuis le déclenchement de la crise sanitaire, et encore aujourd’hui, la production d’alcool a été démultiplié, notamment à la distillerie d’Arcis-sur-Aube (Marne) qui a été totalement dévolue à cette activité. Le débit est ainsi passé à 840 000 litres d’alcool par jour. Sur l’année, cela représentera 20 millions d’hectolitres vendus « à prix coûtant » aux coopérateurs et aux pharmacies. De plus, deux filiales du groupe, la société de recherche et développement ARD et la distillerie Goyard se sont rapprochées pour fabriquer et conditionner une solution hydroalcoolique.
Des perspectives d’investissement ?
La demande en dérivés alcooliques à usage sanitaire, pourrait représenter une alternative salutaire pour Cristal Union. Le directeur général de Cristalco, Stanislas Bouchard, discerne en tout cas « un segment de marché qui a explosé, avec près de 500 nouveaux contacts en très peu de temps ». « On estime que ce marché va non seulement poursuivre sa pente ascendante, et même doubler », se réjouit-il.
On n’en est toutefois pas encore à s’écrier « vive la crise » chez Cristal Union, car de lourdes menaces pèsent toujours sur le marché européen du sucre. En effet, depuis l’année dernière, les cours du sucre se sont effondrés en raison de la surproduction de nouveaux pays producteurs comme l’Inde et la Thaïlande. Dans le même temps, l’Europe mis fin aux quotas de sucre à prix garanti qu’elle réservait aux producteurs de la Communauté. Plus coûteux à produire, le sucre de betterave européen ne fait plus le poids face à celui issu de la canne à sucre.
Pour la première fois de son histoire, Cristal Union a accusé en juin dernier une perte de 99 millions d’euros et annoncé un plan de restructuration de son outil industriel. Il se traduit notamment par la fermeture de deux sucreries, celle de Bourdon, dans le Puy-de-Dôme, et celle de Toury, en Eure-et-Loir.
Confirmée pour septembre de cette année, la fermeture du site de Toury va bénéficier aux deux autres sucreries du groupe situées à proximité, celles de Pithiviers et de Corbeilles-en-Gâtinais. Une partie du personnel de Toury, soit 120 personnes, pourra aussi y être reclassée. L’objectif pour Cristal Union est d’atteindre une taille critique. Le directeur général adjoint, Xaxier Astolfi, faisait remarquer que la capacité moyenne des sucreries du groupe est de 250 000 tonnes par an alors que les principaux producteurs européens atteignent entre 300 000 et 400 000 tonnes. Une volonté stratégique qui se traduira peut-être par des investissements dans les sucreries du Loiret. A quelque chose, malheur pourra être bon.
Par Bruno Goupille
Cristal Union, le géant français du sucre
1er groupe français pour les sucres industriels, Cristal Union est aussi le deuxième opérateur d’alcool agricole en Europe et le troisième producteur de bioéthanol.
Groupe coopératif, Cristal Union regroupe 10 000 planteurs de betteraves dont plus de 98% sont associés de la coopérative. Les producteurs exploitent au total 180 000 hectares de betteraves.
Le groupe compte 18 sites de production et fait travailler 2 000 collaborateurs. Il produit 2 millions de tonnes de sucre par an et 7 millions d’hectolitres d’alcool et de bioéthanol.
Cristal Union a réalisé un chiffre d’affaires de 2 milliards d’euros en 2018.
Sa filiale commerciale, Cristalco, distribue les marques Daddy, Erstein et Eridania. En début d’année 2020, Cristalco a pris le contrôle de Stevia Natura, premier producteur français d’édulcorants naturels.