Enseignement supérieur, l’échiquier territorial

Trois millions d’étudiants sont actuellement dans l’enseignement dit supérieur, donc post-BAC. Le nombre d’inscrits augmente d’année en année, au point que ce secteur économique croît lui-même, plus vite que bien d’autres secteurs. Quand on parle de jeunes, on évoque l’avenir et l’intelligence de la nation, mais aussi la répartition des forces vives de demain dans l’hexagone. Les territoires, ruraux et citadins, ne se contentent donc plus d’attendre, ils cherchent à attirer les écoles et les antennes universitaires, en adéquation avec leurs entreprises, et retenir ainsi leur jeunesse. Quant aux écoles, elles sont des forces économiques, aussi capables d’attirer par leur réputation, des intelligences venues d’ailleurs.

Alors tout le monde est en ordre de marche.

De ce point de vue, Orléans fait un carton plein en recrutant sur son territoire trois écoles de renom. L’ISC il y a deux ans, AgroParisTech en 2022 et l’ESTP en 2023. En même temps, elle finalise la restructuration de son campus universitaire en recyclant l’ancien hôpital en faculté de Lettres. Le développement croisé des territoires des universités, des écoles privées et publiques ne date pas d’hier.

Si les grands groupes comme l’ESSEC, HEC ou ISC se sont construits et se développent dans la capitale depuis les années 60, en Région, le panorama s’est dessiné au gré des créations, des fusions et des rachats. C’est le cas de l’ESCEM, créée à la fin des années 80, par la fusion d’écoles de Poitiers et de Tours, intégrant plus tard Orléans, Clermont-Ferrand et d’autres encore, jusqu’à ce que le Groupe Excelia remporte la mise en 2020 en rachetant l’ESCEM à son tour. Elle a depuis développé quatre campus (Tours, Orléans, La Rochelle et Cachan), où elle accueille 5000 étudiants, dans l’idée d’un ancrage territorial. Tamym Abdessemed, son directeur stratégie et développement des territoires n’hésite pas à parler de visibilité, de taille critique et de plan stratégique.

Où l’on voit que les écoles avancent leurs pions sur l’échiquier de l’enseignement supérieur, de la province vers la capitale et inversement. L’ISC a répondu à l’appel à manifestation d’intérêt lancé par la métropole orléanaise il y a six ans. Si la collectivité estimait important pour elle d’avoir des écoles de renom, lesdites écoles y ont, elles aussi trouvé leur intérêt. « Le premier est la rétention des jeunes talents sur le territoire », explique Pierre Barreaud, directeur délégué de l’lSC à Orléans. Une école de renom attire les jeunes ; l’ISC Paris Campus Orléans est de celles-là et compte près de 75 % d’étudiants locaux. Beaucoup d’entre eux resteront sur le territoire au terme des cinq années d’études ; preuve qu’il est attractif.

Job et salaire à la clef

Autre élément décisif pour une école, la typologie de l’enseignement. L’alternance n’est plus une variable, mais un incontournable. Si elle est l’ADN des CFA, les écoles d’ingénieur et de commerce, l’adoptent dès la troisième année. Les étudiants intègrent ainsi le monde de l’entreprise. Des entreprises locales bien sûr, qui n’attendent que des têtes bien faites, même si le travail n’est pas terminé… « C’est encore mieux, précise Christophe Masson, directeur de la Cosmetic Valley, les entreprises veulent contribuer à la formation, au plus près de leurs besoins, de ceux qui vont intégrer leurs lignes de production et leurs services support ». L’ISC comptera 500 élèves à la rentrée de septembre 2023. C’est autant de jeunes cadres qui vont intégrer le tissu économique et nourrir les entreprises, particulièrement en cette période de disette salariale. Le Crédit Agricole a 80 postes non pourvus, l’industrie attend plus d’ingénieurs encore et les entreprises du bâtiment cherchent 450 apprentis très ciblés.  Dans ces conditions, les jeunes diplômés trouvent un job sans difficulté, souvent bien payé, en moyenne 35K€/ an pour débuter. Christophe Léger, directeur de Polytech, école d’ingénieur universitaire, confirme le chiffre « Master ou diplôme d’ingénieur, qu’importe, dit-il. Les premiers sont techniquement très pointus dans leur domaine et sont prisés par certaines entreprises. Les ingénieurs, eux, ont une connaissance élargie de la gestion de projet, des langues et de la présentation de budget. L’approche n’est pas la même, mais les salaires d’embauche confirment que la qualité reste la première valeur recherchée ».

Même son de cloche à Tours, à l’école du Cercle digital, où depuis dix ans, 70 étudiants se partagent les bancs de cette école privée consacrée aux métiers de la communication, elle-même adossée à une agence de com. Deux ans d’étude en alternance permettent aux élèves d’intégrer les agences du secteur. « Ce qui importe, explique Jérôme Argelich, son directeur des programmes, c’est que les étudiants mettent au centre de tout, le plaisir de créer et la curiosité.  Au-delà de la créativité, on développe leur acuité au monde ». Vaste programme, renforcé par de nouveaux masters de directeur artistique, concepteur rédacteur et planeur stratégique […]

Dossier spécial "Enseignement supérieur" réalisé par Stéphane De Laage. Pour retrouvez le dossier complet, consultez  nos éditions pdf ici.
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