Comment va se passer l’ouverture des restaurants et bars après leur confinement ? La majorité des gérants enregistre déjà de grosses pertes financières. © iStock
Entre le respect des mesures sanitaires et la perte de chiffre d’affaires des derniers mois, le secteur de la restauration souffre. Certains ont décidé de livrer des repas. D’autres attendent de pouvoir ouvrir pleinement.
« Restaurants, cafés et hôtels resteront fermés. » Lors de son allocution sur le déconfinement du 11 mai, Emmanuel Macron, Président de la République, a été on ne peut plus clair. Si ces établissements peuvent de nouveau accueillir du public depuis le 2 juin dans les zones vertes, l’annonce des fermetures obligatoires des restaurants et bars en a sonné plus d’un. « Les restaurateurs comprennent l’enjeu sanitaire, affirme-t-on à la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) du Centre-Val de Loire. Mais ils sont inquiets pour la pérennité de leurs entreprises. » Malgré les demandes de chômage partiel pour les salariés de ces établissements et les 1 500 euros du fonds de solidarité pour les indépendants et les très petites entreprises (TPE) (destinés aux entreprises et non aux individus gérants l’entreprise), certaines structures ont vu fondre toute leur trésorerie en à peine un mois. Fort heureusement, la suppression des charges annoncée par le gouvernement est une bonne nouvelle. La raison ? Bien souvent, les loyers continuent d’être réclamés, il faut avancer les salaires. Et les commandes reçues quelques jours avant le confinement sont tout bonnement perdues. Certains restaurateurs doivent donc faire un crédit pour faire face et éviter une fermeture définitive. Certains demandent la possibilité de créer des terrasses gratuites devant leurs établissements jusqu’à la fin de l’année. Certains, encore, réclament une baisse voire une suppression des loyers au moins pour la période de confinement.
Près de 80% de chiffre d’affaires en moins
Pour chiffrer l’impact de ces deux mois « blancs », le Comité régional du tourisme du Centre-Val de Loire a enquêté sur les conséquences du confinement sur le secteur touristique*. Le résultat est alarmant : pour les mois de mars et avril, la perte de chiffre d’affaires s’élève en moyenne à 80% par rapport à 2019, en particulier dans l’hôtellerie et la restauration. Du côté des réservations, l’étude met en avant une baisse de 85% pour la période estivale (juillet et août). Les hôteliers (90) et les restaurateurs (87%) sont inquiets pour leurs activités. De fait, « un professionnel sur cinq pense geler les embauches de CDD et de saisonniers ». Selon le comité régional du tourisme, un salarié du secteur touristique « suscite plus de 90 000 euros de retombées économiques » par an sur le territoire régional. Un seul emploi de perdu peut coûter cher pour le secteur à court comme à long terme.
Les chefs se réinventent
La situation a donc tout de suite été compliquée, notamment dans le secteur de la restauration. « Il faudrait une année blanche (de charges, ndlr) pour s’en remettre, estime-t-on à l’UMIH du Centre. Sur les locaux appartenant aux collectivités, on a senti un effort. Du côté des bailleurs privés, on attend encore un geste… » Pour tenter de « sauver les meubles » avec un chiffre d’affaires, même restreint, ou pour continuer de faire vivre les communes, « beaucoup se sont mis à faire de la vente à emporter et/ou du ‘’click and collect’’, complète la CCI régionale. Au contraire, d’autres en faisaient avant le confinement et n’ont pas ouvert. Il s’agit vraiment d’un choix personnel ». D’autres établissements et associations de restaurateurs ont décidé d’agir autrement : dans le Loiret, plusieurs restaurateurs ont rallumé les fourneaux pour proposer des plateaux repas à livrer aux particuliers et aux entreprises ; Cuisine en Loir-et-Cher a également développé la vente de plats aux entreprises mais aussi aux personnes âgées des Ehpad (dans le cas du chef Christophe Hay), afin de soutenir les agriculteurs locaux ; Touraine Gourmande livre des repas aux soignants sur le front. Pour tout cela encore faut-il avoir les moyens de livrer. Certains établissements n’ont pas cette chance, d’autant plus s’ils débutent. Chacun fait donc comme il le peut et comme il l’entend. Les avis divergent sur des ouvertures rapides, mais en petits effectifs, ou des ouvertures plus tardives dans l’été, mais avec une équipe au complet et des terrasses remplies à ras bord. Tout en respectant les mesures sanitaires (aménagement des espaces, gel hydroalcoolique, équipement des salariés – non chiffré à l’heure actuelle)… Et les 4m2 obligatoires par personne, évidemment.
*l’étude a été réalisée du 6 au 14 mai ; 950 établissements ont répondu.
Par Claire Seznec